Traumatismes


Traumas précoces

Le trauma est en quelque sorte ce qui constitue un destin humain : ce qui intéresse un analyste c’est ce qu’il advient du trauma, qu’il soit dépassé ou non ainsi que ses séquelles éventuelles.

Mais tout évènement dramatique, même précoce, n’est pas nécessairement traumatique.

De nombreux travaux récents, notamment en neurosciences, montrent que le trauma psychique n’est pas équivalent aux drames ordinaires de la vie mais qu’il a des caractéristiques et des traces qui lui sont propres. Ce qui pour un individu est trauma et peut s’inscrire profondément dans le psychisme, ne sera qu’un souvenir pénible pour celui qui a les moyens de surmonter et d’élaborer le traumatisme.

Un traumatisme peut se définir à partir de l’effet catastrophique qu’il a sur l’individu, effet qui peut être réactivé même des années après sa survenue. Le trauma a une dimension tragique alors que les autres malheurs de la vie ne relèvent que du drame.

On peut considérer que tout ce qui menace la sécurité interne d’un enfant peut constituer un trauma narcissique. Parmi les traumatismes possibles, Ferenczi cite l’amour passionné, les punitions passionnelles, et enfin, le terrorisme de la souffrance et des plaintes continuelles.

Si les traumatismes se répètent, cela peut aboutir à des clivages multiples, à une véritable fragmentation, une atomisation de la personnalité. Il peut également s’agir de micro-traumas répétitifs.

C’est la répétition du trauma puis l’hypocrisie, la culpabilisation et le rejet de la victime, ainsi que le mensonge qui l'entourent, qui rendent celui-ci pathogène.

L’insuffisance de bonne stimulation et la carence affective peuvent être un trauma au même titre qu’une stimulation excessive.

Le traumatisme perturbe ou interrompt le processus de construction du moi et l’enjeu de tout travail analytique est de permettre au sujet de reprendre son développement là où il a été stoppé. Et pour que ceci se passe, c’est dans la relation entre le patient et l’analyste qu'il doit se rejouer symboliquement.

Les traumas précoces sont ceux qui sont enfouis dans les couches les plus profondes de la psyché. Les autres éléments sont conservés alors que les traumas sont totalement ensevelis, devenant inaccessibles à la conscience. L’expérience traumatique, même si elle a laissé des traces mnésiques ineffaçables, est quelque chose qui ne peut se représenter.

Certains traumas sont reconnus et nommés par le sujet mais sans émotions, sans pouvoir être vraiment ressentis. C’est à l’analyste d'en déceler la trame sous-jacente et de permettre au patient de les ressentir pleinement et de les comprendre.

Ferenczi soutenait que tous les états traumatiques résultaient d’un traumatisme réel, et qu’aucune analyse ne pouvait être considérée comme complète si le niveau de ce traumatisme réel n’avait pas été atteint.

Un traumatisme mental est un événement que nos structures psychiques n'arrivent pas à digérer. Un événement monstrueux et effrayant, quelque chose dont les mots ne peuvent pas rendre compte. On ne peut en parler, c'est la peur, l'effroi ou la honte. Et lorsque la honte d'y avoir été impliqué interdit d'en parler, alors on enferme cet événement traumatique dans une explication mensongère.

Cet événement enterré dans un mensonge se transmet de l'inconscient des parents à celui de l'enfant, et engendre ce que la psychanalyse contemporaine appelle un "fantôme". « Ce qui maintient vivant un traumatisme, et en fait un fantôme transmissible à ses descendants, est le fait de l’avoir interprété à tort. Une histoire transmise avec une explication mensongère fait des ravages dans l’inconscient des lignées » (D. Dumas). 

Il est donc essentiel de pouvoir s’occuper de nos « traumas » personnels mais également de ceux de nos ancêtres que nous portons en nous. Car ce qui résiste en nous et contre nous est en fait ce qui ne nous appartient pas.